Cass. civ. 3ème, 24 novembre 2021, n°20-20.973
La procédure devant le juge-commissaire qui consiste, sur le fondement de l’article L. 641-12 alinéa 3 du Code de commerce, à demander le constat de la résiliation de plein droit du bail d’un immeuble utilisé pour l’activité de l’entreprise, en raison du défaut de paiement des loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement de liquidation judiciaire du preneur, obéit à des conditions spécifiques et est distincte de celle qui tend, en application de l’article L. 145-41 du Code de commerce, à faire constater l’acquisition de la clause résolutoire stipulée au contrat de bail. Elle peut donc être introduite sans nécessité de faire délivrer un commandement de payer au préalable.
Des époux ont donné à bail des locaux commerciaux à une société. Cette dernière a fait l’objet d’un redressement judiciaire, converti en liquidation judiciaire.
Dans ce contexte, les bailleurs ont déposé une requête devant le juge-commissaire en constatation de la résiliation du bail sur le fondement des articles L. 641-12 et L.622-14 du Code de commerce pour défaut de paiement des loyers postérieurs au prononcé de la liquidation judiciaire.
C’est seulement ensuite que les bailleurs ont délivré au liquidateur judiciaire de la société locataire des locaux commerciaux, un commandement de payer les loyers impayés postérieurs au prononcé de la procédure de liquidation.
En outre, ils l’ont assigné en constatation de l’acquisition de la clause résolutoire devant le juge des référés.
La Cour d’appel de Poitiers, par un arrêt en date du 14 mai 2019, a déclaré irrecevable la demande des bailleurs tendant à voir constater l’acquisition de la clause résolutoire en application des articles L.641-12 et L.622-14 du Code de commerce, au motif que ces derniers n’avaient pas fait délivrer à la société locataire un commandement de payer visant la clause résolutoire, préalablement à la mise en œuvre des articles L.641-12 et L.622-14 du Code de commerce.
Les bailleurs ont alors formé un pourvoi en cassation.
La Haute Cour casse et annule l’arrêt rendu par la Cour d’appel de Poitiers et rappelle au visa des articles L. 641-12, 3° et R. 641-21, alinéa 2 du Code de commerce, que lorsque le juge-commissaire est saisi sur le fondement de L. 641-12, 3°, du Code de commerce d’une demande de constat de la résiliation de plein droit du bail d’un immeuble utilisé pour l’activité de l’entreprise, en raison d’un défaut de paiement des loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement de redressement judiciaire du preneur, cette procédure, qui obéit à des conditions spécifiques, est distincte de celle qui tend, en application de l’article L. 145-41 du Code de commerce, à faire constater l’acquisition de la clause résolutoire stipulée au contrat de bail.
La Troisième chambre civile fait ainsi droit aux bailleurs en distinguant les fondements de la résiliation du bail et le formalisme obligatoire pour le bailleur. Comme le précise la Cour de cassation, en agissant devant le juge-commissaire pour demander la constatation de la résiliation du bail sur le fondement de l’article L. 641-12, 3°, sans revendiquer le bénéfice de la clause résolutoire, le bailleur n’est pas dans l’obligation de délivrer le commandement exigé par l’article L. 145-41 du Code de commerce. En se prononçant ainsi, la Haute Cour confirme sa jurisprudence antérieure, qui avait déjà conclu à la spécificité de la procédure prévue par l’article L. 641-12, 3° du Code de commerce.
À rapprocher : Cass, Com., 9 octobre 2019, n° 18-17.563