Cass. com., 5 septembre 2018, n°17-14.960
L’article L.622-27 du code de commerce, qui interdit au créancier, qui n’a pas répondu à l’avis du mandataire judiciaire dans le délai de trente jours, de contester ultérieurement la proposition de ce dernier, n’a pas vocation à s’appliquer lorsqu’une instance au fond était en cours au jour de l’ouverture de la procédure collective du débiteur.
En l’espèce, par jugement du 24 avril 2014, une société a été placée en redressement judiciaire. Cette société était partie dans le cadre d’une instance au fond en cours à propos de l’exécution d’un contrat de location financière devant le Tribunal de commerce de Paris.
La société de location financière a déclaré la créance, objet de l’instance en cours qui l’opposait au débiteur, au passif de la procédure de redressement judiciaire de ce dernier.
Dans le cadre de la vérification du passif, le mandataire judiciaire a informé le créancier que sa créance était discutée, qu’elle entendait proposer son rejet au juge-commissaire et l’a invitée à répondre dans le délai de trente jours. La société de location financière s’est abstenue de répondre au courrier de contestation du mandataire judiciaire et a demandé au Tribunal de commerce de Paris de fixer sa créance au passif de sa débitrice.
Le Tribunal de commerce de Paris ayant déclaré irrecevable la demande de la société de location financière, cette dernière a interjeté appel du jugement. Par un arrêt du 28 novembre 2016, la Cour d’appel de Paris a infirmé la décision des premiers juges au motif que la sanction du défaut de réponse dans le délai de 30 jours, prévue par l’article L.622-27 du code de commerce, à savoir l’interdiction de contester ultérieurement la proposition du mandataire judiciaire, ne s’applique pas dans le cadre d’une instance en cours. La Cour d’appel a considéré que le mandataire judiciaire avait à tort proposé le rejet de la créance quand il aurait dû proposer au juge-commissaire de constater qu’une instance était en cours.
Saisie d’un pourvoi en cassation du mandataire judiciaire, la Cour de cassation, par un arrêt du 5 septembre 2018 publié au bulletin, confirme l’arrêt de la Cour d’appel en ces termes : « C’est à bon droit que l’arrêt retient que l’article L.622-27 du code de commerce, qui interdit au créancier, qui n’a pas répondu à l’avis du mandataire judiciaire dans le délai de trente jours, de contester ultérieurement la proposition de ce dernier, n’a pas vocation à s’appliquer lorsqu’une instance au fond était en cours au jour de l’ouverture de la procédure collective du débiteur. »
Selon les dispositions de l’article L.622-22 du code de commerce, les instances au fond en cours sont interrompues jusqu’à ce que le créancier poursuivant ait procédé à la déclaration de sa créance. Elles sont reprises de plein droit après la déclaration de créance et la mise en cause du mandataire judiciaire (et le cas échéant de l’administrateur judiciaire) mais tendent uniquement à la constatation des créances et à la fixation de leur montant. La créance échappe donc à la procédure de vérification des créances (l’admission ou le rejet de la créance ne relevant pas de l’office du juge-commissaire), la décision rendue étant mentionnée sur l’état des créances à la demande du mandataire judiciaire conformément aux dispositions de l’article R.622-20 du code de commerce.
Dès lors, il est logique que la sanction prévue par l’article L.622-27 du code de commerce liée à l’absence de réponse à la contestation de la créance par le mandataire judiciaire et la sanction, à savoir l’interdiction de contester ultérieurement la proposition du mandataire judiciaire, ne s’applique pas aux créances faisant l’objet d’une instance en cours.
A rapprocher : L.622-22 du code de commerce ; L.622-27 du code de commerce ; Cass. com., 15 mars 2005, n°00-19.918