Cass. com., 24 mai 2018, n°17-10.117
Ne peut être déduit de l’état de cessation des paiements de la société, la preuve de l’existence d’une insuffisance d’actif, laquelle s’apprécie au regard de la situation globale du passif et de l’actif de la société, à la date de la démission du dirigeant.
Ce qu’il faut retenir : Ne peut être déduit de l’état de cessation des paiements de la société, la preuve de l’existence d’une insuffisance d’actif, laquelle s’apprécie au regard de la situation globale du passif et de l’actif de la société, à la date de la démission du dirigeant.
Pour approfondir : En l’espèce, Monsieur X, associé unique et dirigeant de la société Y, a cédé ses actions à la société Z le 15 juin 2010 puis a démissionné de ses fonctions de dirigeant le 30 juin 2010.
La société Y a été mise en redressement le 10 novembre 2010, puis en liquidation judiciaire le 24 novembre 2010.
Postérieurement, un jugement a reporté la date de cessation des paiements au 15 avril 2010, soit antérieurement à la démission du dirigeant.
Le 24 octobre 2012, le liquidateur de la société Y a assigné Monsieur X en responsabilité pour insuffisance d’actif.
La Cour d’appel de Bourges, par arrêt du 10 novembre 2016, a condamné Monsieur X à la somme de 100 000 euros au titre de sa contribution à l’insuffisance d’actif.
Pour justifier leur décision, les juges du fond, se plaçant justement à la date de démission du dirigeant, ont considéré qu’il convenait de déduire de l’état de cessation des paiements existant, la présence d’une insuffisance d’actif. Ils ont conforté cette position en référence au bilan de la société qui révélait « l’existence d’une opération d’écriture comptable destinée à dissimuler une insuffisance d’actif ».
La question posée aux juges suprêmes était alors de savoir quelles sont les modalités d’appréciation d’une insuffisance d’actif en cas de démission du dirigeant ?
La Cour de cassation, par arrêt en date du 24 mai 2018, a, au visa des articles L.631-1 et L.651-2 du Code de commerce, cassé et annulé la décision rendue par les juges du fond.
Aux termes de son arrêt, la Haute juridiction estime, d’une part, que la Cour d’appel « ne pouvait déduire de l’état de cessation des paiements de la société, constitué par l’impossibilité de faire face au passif exigible avec l’actif disponible, la preuve de l’existence d’une insuffisance d’actif, laquelle s’apprécie au regard de la situation globale du passif et de l’actif de la société, à la date de la démission », tout en précisant, d’autre part, qu’au jour de la démission du dirigeant, la société Y disposait de capitaux propres de nature à exclure l’existence d’une insuffisance d’actif.
Par cet arrêt, la Cour de cassation confirme sa jurisprudence, selon laquelle l’insuffisance d’actif doit être constatée à la date de cessation des fonctions de l’ancien dirigeant poursuivi (Cass. com., 14 octobre 2008, n°07-19.000 pour une application avant la loi du 26 juillet 2005 et Cass. com., 22 janvier 2013, n°11-27.420 pour une application postérieure à cette loi). Si la Haute juridiction vient rappeler un principe existant, elle a toutefois le mérite de la clarté dans cet arrêt, par lequel elle apporte une précision : l’insuffisance d’actif ne peut se déduire de la cessation des paiements, même antérieure à la démission du dirigeant.
A rapprocher : Article L.631-1 du Code de commerce ; Article L.651-2 du Code de commerce ; Cass. com., 14 octobre 2008, n°07-19.000 ; Cass. com., 22 janvier 2013, n°11-27.420