Cass. soc., 16 mai 2018, n°16-25.898 et n°16-25.899
L’assurance prévue à l’article L.3253-6 du code du travail couvre dans les conditions énoncées aux articles L.3253-2 à L.3253-21 du même code, le risque de non-paiement des sommes dues aux salariés en exécution du contrat de travail en cas de procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire…
Ce qu’il faut retenir : L’assurance prévue à l’article L.3253-6 du code du travail couvre dans les conditions énoncées aux articles L.3253-2 à L.3253-21 du même code, le risque de non-paiement des sommes dues aux salariés en exécution du contrat de travail en cas de procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire et non en cas de liquidation de la société résultant d’une décision judiciaire ayant ordonné sa dissolution sur le fondement des dispositions de l’article 1844-7 5° du code civil quand celle-ci était toujours in bonis.
Pour approfondir : En l’espèce, des salariés ont été engagés par une société, en qualité de secrétaire et d’assistante de gestion.
Subséquemment, par jugement du Tribunal de grande instance de Compiègne, la dissolution de la société a été prononcée en application de l’article 1877-7 5° du code civil (mésentente entre associés).
Les salariés de la société ont par la suite été licenciés pour inaptitude physique. Prétendant être victimes d’un harcèlement moral, ils ont saisi la juridiction prud’homale pour obtenir la nullité de leur licenciement et le paiement de diverses indemnités liées à la rupture, ainsi qu’un rappel de salaire. La juridiction prud’homale les a déboutés de leur demande de nullité du licenciement mais a fixé leur créance de rappel de salaire et ordonné leur inscription au passif de la société.
Par arrêts avant dire droit, la Cour d’appel, considérant que la liquidation judiciaire de l’employeur pour mésentente entre associés ne privait pas les salariés du bénéfice de la garantie de l’AGS, a ordonné la réouverture des débats pour mettre l’AGS en cause. De son coté, l’AGS a fait valoir qu’elle n’entendait pas intervenir à l’instance, en l’absence de redressement ou de liquidation judiciaires de la société.
Postérieurement, par arrêts sur le fond, la Cour d’appel d’Amiens a déclaré nul le licenciement des salariés, condamnant le liquidateur, ès qualités, à payer aux salariés des indemnités liées à la rupture et une somme à titre de rappel de salaire. Puis, après avoir constaté que la liquidation de la société résultait d’une décision judiciaire ayant ordonné sa dissolution sur le fondement des dispositions de l’article 1844-7 5° du code civil et que celle-ci était toujours in bonis, la Cour d’appel a déclaré sa décision opposable à l’AGS.
La question posée aux magistrats du quai de l’horloge était alors de savoir si : lorsque la liquidation d’une société in bonis résultait d’une décision judiciaire ayant ordonné sa dissolution, les salariés pouvaient compter sur la garantie de l’AGS concernant leurs créances salariales.
La Chambre sociale de la Cour de cassation, au visa des articles L.3253-1 alinéa 2 et L.3253-6 du code du travail, casse et annule les arrêts rendus en ce qu’ils déclarent la décision opposable à l’AGS, en estimant que « l’assurance prévue à l’article L.3253-6 du code du travail couvre dans les conditions énoncées aux articles L.3253-2 à L.3253-21 du même code, le risque de non-paiement des sommes dues aux salariées en exécution du contrat de travail en cas de procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire (… ) ».
La Cour de cassation rejette alors expressément la garantie des créances salariales par l’AGS en l’absence de procédure collective et notamment dans le cas d’espèce où « la liquidation de la société résulte d’une décision judiciaire ayant ordonné sa dissolution sur le fondement des dispositions de l’article 1844-7 5° du code civil et que celle-ci- était toujours in bonis ».
La Cour de cassation reste ainsi cohérente avec sa jurisprudence. En effet, depuis longtemps demeure le principe selon lequel pour que la garantie puisse être mise en œuvre, il est nécessaire de constater que l’employeur a fait l’objet d’une procédure de règlement judiciaire (Cass. soc, 7 février 1990, n°87-40.780).
A rapprocher : Articles L.3253-1 (alinéa 2), L.3253-6, L.3253-2 à L.3253-21 du code du travail ; Article 1844-7 5° du code civil ; Cass. soc, 7 février 1990, n°87-40.780