Cass. soc., 5 avril 2018, n°16-25.477, n°16-25.486, n°16-25.487, n°16-25.488, n°16-25.489, n°16-25.490, n°16-25491, n°16-25492
Le préjudice d’anxiété, qui ne résulte pas de la seule exposition à un risque créé par l’amiante, naît à la date à laquelle les salariés ont eu connaissance de ce risque.
Ce qu’il faut retenir : Le préjudice d’anxiété, qui ne résulte pas de la seule exposition à un risque créé par l’amiante, naît à la date à laquelle les salariés ont eu connaissance de ce risque. Si cette connaissance du risque est postérieure à l’ouverture de la procédure collective, elle n’ouvre pas droit à une indemnisation par l’AGS.
Pour approfondir : En l’espèce, la société B venant au droit de la société A a fait l’objet d’un redressement judiciaire puis d’un plan de cession au bénéfice de la société C le 18 juillet 1997. Cette dernière a également été placée en redressement judiciaire le 1er octobre 2003 converti en liquidation judiciaire le 2 février 2004.
Par arrêté du 23 décembre 2011, la société B a été inscrite sur la liste des établissements ouvrant droit à l’allocation de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante (ACAATA) pour la période de 1928 à 1996.
Plusieurs anciens salariés employés à des périodes distinctes par les sociétés ont par la suite saisi la juridiction prud’homale pour obtenir l’indemnisation de leur préjudice d’anxiété subi en raison d’une exposition à l’amiante pendant l’exécution de leur contrat de travail ainsi que la garantie de leur créance par l’AGS.
Par arrêts en date du 6 septembre 2016, la Cour d’appel d’Agen a estimé que l’AGS devait garantir la créance fixée au passif de la société C. Selon la Cour d’appel, la date de naissance du préjudice d’anxiété, qui était celle du jour où le salarié avait connaissance du risque et non celle de l’exposition au risque, devait être fixée au plus tard le 11 juin 2002, soit antérieurement à l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire de la société B (intervenue le 1er octobre 2003).
Saisie sur pourvois, la Chambre sociale a été amenée à se prononcer sur la date à laquelle les salariés ont eu connaissance du risque lié à l’amiante.
Par arrêt en date du 5 avril 2018, la Cour de cassation, au visa de l’article L.3253-8 1° du Code du travail dans sa rédaction alors applicable, a cassé et annulé l’arrêt rendu par la Cour d’appel d’Agen. Rappelant que le préjudice d’anxiété ne résulte pas de la seule exposition à un risque créé par l’amiante mais est constitué par les troubles psychologiques qu’engendre la connaissance de ce risque par les salarié, elle estime que « le préjudice d’anxiété était né à la date à laquelle les salariés avaient eu connaissance de l’arrêté ministériel d’inscription de la société [B] sur la liste des établissements ouvrant droit à l’allocation de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante, soit au plus tôt le 23 décembre 2011, à une date postérieure à l’ouverture de la procédure collective ».
Par cet arrêt, la Cour de cassation est restée fidèle à sa jurisprudence, en se référant à la connaissance par les salariés de l’arrêté ministériel d’inscription de la société en cause sur la liste des établissements permettant la mise en œuvre de l’ACAATA.
Ainsi, si la connaissance de l’arrêté est antérieure au jugement d’ouverture de la procédure collective, elle ouvre droit à la garantie par l’AGS (voir Cass. soc., 22 mars 2016, n°14-24.410) ; à l’inverse, comme en l’espèce, si la connaissance est postérieure au jugement d’ouverture, les salariés ne bénéficient pas de l’indemnisation du préjudice par l’AGS (voir notamment Cass. soc., 2 juillet 2014, n°12-29.788)
A rapprocher : Article L.3253-8 1° du Code du travail dans sa rédaction applicable ; Cass. soc., 22 mars 2016, n°14-24.410 ; Cass. soc., 2 juillet 2014, n°12-29.788