La déclaration de créance et l’admission des intérêts d’un prêt dont le cours n’a pas été arrêté

Photo de profil - LACHENAL Clarisse | Avocat | Lettre du Restructuring

LACHENAL Clarisse

Avocat

Cass. com., 28 février 2018, n°16-24.867

Si le créancier n’a pas l’obligation légale de distinguer, dans sa déclaration de créance, le montant des intérêts à échoir du montant du capital restant dû, le juge commissaire peut admettre la créance d’intérêts de manière distincte, et peut substituer à leur montant déclaré les modalités de calcul qui résultent du contrat de prêt.

Ce qu’il faut retenir : Si le créancier n’a pas l’obligation légale de distinguer, dans sa déclaration de créance, le montant des intérêts à échoir du montant du capital restant dû, le juge commissaire peut admettre la créance d’intérêts de manière distincte, et peut substituer à leur montant déclaré les modalités de calcul qui résultent du contrat de prêt.

Pour approfondir : En l’espèce, une société a été placée en redressement judiciaire en avril 2014. Une banque a déclaré sa créance au passif de ladite société, au titre d’un prêt, pour un montant total non échu de 298 242 euros, en y intégrant les cotisations d’assurance décès-invalidité et les intérêts au taux contractuel de 3,65 % par an à titre privilégié.

Par ordonnance en date du 11 février 2015, le juge commissaire a admis la créance de la Banque à hauteur de 262 079,43 euros à titre nanti, correspondant au capital de la dette non échue, outre les intérêts au taux de 3,65 %. Mais il a rejeté la demande d’admission de la somme correspondant aux intérêts conventionnels à échoir. Le créancier a interjeté appel de cette ordonnance.

La Cour d’appel de Paris, dans une décision du 12 avril 2016, n’a pas suivi l’argumentation du créancier et a confirmé l’ordonnance rendue par le juge commissaire. La Cour d’appel a considéré que les intérêts naissant de la mise à disposition dans le futur de la somme prêtée, ne pouvaient figurer sur l’état du passif au jour du jugement déclaratif. Dès lors, pour la Cour d’appel, le juge-commissaire avait fait une correcte application des dispositions légales et réglementaires et évité que les intérêts « ne soient admis deux fois ».

La banque a formé un pourvoi, soutenant à nouveau qu’en statuant ainsi, quand le montant des intérêts à échoir dont elle était créancière avait pu être calculé au jour du jugement d’ouverture, selon décompte joint à la déclaration de créance, de sorte que ces intérêts devaient être admis au passif pour leur montant déclaré, la Cour d’appel aurait violé les articles L.622-25 et R.622-23 du Code de commerce.

La Cour de cassation a rejeté le pourvoi du créancier dans son arrêt du 28 février 2018.

La Haute juridiction énonce ainsi que : « si aucun texte n’oblige le créancier à distinguer, dans la déclaration de créance, le montant des intérêts à échoir du montant du capital restant dû, il est loisible au juge-commissaire d’admettre la créance d’intérêts de manière distincte et de substituer à leur montant déclaré les modalités de calcul qui résultent du contrat de prêt ».

Par cet arrêt, la Cour de cassation vient préciser sa décision de 2015 (Cass. com., 5 mai 2015, n°14-13.213) selon laquelle : « aucun texte n’oblige le créancier à distinguer, dans la déclaration de créance, le montant des intérêts à échoir du montant du capital à échoir ».

A rapprocher : Article L.622-24 du Code de commerce ; Article L.622-25 du Code de commerce ; Article R.622-23 du Code de commerce ; Cass. com., 5 mai 2015, n°14-13.213

Sommaire

Autres articles

Refus de l’exequatur d’une sentence arbitrale contraire au principe de l’arrêt des poursuites individuelles
Refus de l’exequatur d’une sentence arbitrale contraire au principe de l’arrêt des poursuites individuelles Cass. com. 8 févr. 2023, n°21-15.771, publié au bulletin     Ce qu’il faut retenir : Est contraire à l’ordre public international, au mépris du principe de…
some
Bail commercial et interruption de l’action en constat de l’acquisition de la clause résolutoire pour défaut de paiement des loyers antérieurs
Cass. civ. 3ème, 13 avril 2022, n°21-15.336 L’action introduite par le bailleur avant le placement sous procédure collective du débiteur, en vue de faire constater l’acquisition de la clause résolutoire figurant au bail commercial pour défaut de paiement des loyers…
some
Revendication du bien vendu avec réserve de propriété entre les mains du sous-acquéreur
En cas de revente d’un bien à un sous-acquéreur, le vendeur initial, bénéficiaire d'une clause de réserve de propriété, peut revendiquer ledit bien en nature directement entre les mains du sous-acquéreur. Cette action, qui est fondée sur les dispositions
some
Renonciation au transfert de la charge des sûretés décharge de la caution
Le créancier, bénéficiaire d’un nantissement du fonds de commerce de la société débitrice ne peut plus se prévaloir du cautionnement consenti par les co-gérants dès lors qu’il renonce, dans le cadre d’un plan de cession, à son nantissement.
Ratification implicite d’une créance déclarée avec un pouvoir irrégulier
Le créancier peut ratifier la déclaration faite en son nom jusqu’à ce que le juge statue sur l’admission de la créance. Aucune forme particulière n’est prévue pour cette ratification, ce dont il résulte qu’elle peut être implicite.
Tierce opposition au jugement d’extension de procédure
Le créancier, qui n’y était pas partie, peut former tierce-opposition à un jugement statuant sur l’extension d’une procédure de liquidation judiciaire à son débiteur, si ce jugement a été rendu en fraude de ses droits ou s’il invoque des moyens