CE, 20 décembre 2017, n°403267
Si la proposition de rectification intervient antérieurement au jugement d’ouverture de la liquidation judiciaire, l’administration fiscale n’est pas tenue de la réitérer auprès du liquidateur, qui est simplement substitué au contribuable dessaisi à compter de sa désignation.
Ce qu’il faut retenir : Si la proposition de rectification intervient antérieurement au jugement d’ouverture de la liquidation judiciaire, l’administration fiscale n’est pas tenue de la réitérer auprès du liquidateur, qui est simplement substitué au contribuable dessaisi à compter de sa désignation.
Pour approfondir : En l’espèce, le 26 septembre 2006, l’administration fiscale a adressé à une société une proposition de rectification qui a été contestée par la dirigeante de cette société dans un courrier du 27 septembre 2006. La société a été placée en liquidation judiciaire par jugement du 29 septembre 2006 et l’administration fiscale a confirmé les redressements par un courrier du 20 octobre 2006 adressé à la société, prise en la personne de sa gérante, et au liquidateur.
Suite à un jugement correctionnel du 8 septembre 2009, la dirigeante a été déclarée solidairement responsable des impôts et des pénalités dus par la société. La Cour d’appel administrative de Lyon, par un arrêt du 5 juillet 2016, a confirmé la décision de première instance déboutant la gérante de sa demande de décharge des impositions dues à ce titre.
La question de droit posée au Conseil d’Etat était notamment de savoir si l’administration fiscale, qui avait régulièrement adressé la proposition de rectification au contribuable antérieurement au jugement d’ouverture de sa liquidation judiciaire, devait réitérer cette proposition au liquidateur après intervention de ce jugement afin que ce dernier dispose d’un nouveau délai de trente jours pour présenter ses éventuelles observations.
On sait qu’après l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire, les droits et les actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés par le liquidateur conformément aux dispositions de l’article L.641-9 du Code de commerce.
Les droits et actions visés par les dispositions de l’article L.641-9 du Code de commerce incluent ceux qui se rapportent aux dettes fiscales. En application de ces dispositions, la Cour de cassation, par un arrêt du 21 février 2012, avait jugé que les actes de la procédure de rectification d’imposition, qui sont susceptibles d’avoir une influence sur le patrimoine du débiteur, doivent, pour cette raison, être adressés au liquidateur (Cass.com., 21 février 2012, n°11-12.138).
Si l’ouverture de la liquidation judiciaire intervient pendant le délai de 30 jours imparti au contribuable pour répondre à la proposition de rectification de l’administration fiscale, cette dernière doit-elle adresser une nouvelle proposition au liquidateur judiciaire, exerçant les droits et actions à caractère patrimonial du débiteur dessaisi, afin de faire courir un nouveau délai de trente jours pour lui permettre de présenter ses éventuelles observations ?
Le Conseil d’Etat répond à cette question par la négative en considérant, en ces termes, que : « (…) si le jugement d’ouverture de la liquidation judiciaire intervient au cours du délai de trente jours imparti au contribuable, à compter de la réception de la proposition de rectification, pour présenter des observations, ce délai continue à courir à l’égard du liquidateur qui se trouve, à compter de sa désignation, substitué au contribuable. »
Dans l’hypothèse où la proposition de rectification est intervenue antérieurement au jugement d’ouverture de la liquidation judiciaire, le liquidateur est simplement substitué au contribuable dessaisi à compter de sa désignation, lequel doit l’informer notamment au sujet de ses créanciers, de ses dettes et des instances en cours, conformément aux dispositions de l’article L.622-6 du Code de commerce, applicables à la procédure de liquidation judiciaire par renvoi de l’article L.641-1 du même code. Dans ces conditions, l’administration fiscale n’est pas tenue de notifier au liquidateur cette proposition afin de faire courir un nouveau délai de trente jours pour permettre à ce dernier de présenter ses éventuelles observations
Ainsi, la présente décision vient préciser la règle posée par la décision de la Chambre commerciale du 21 février 2012 précitée.
Cette solution se justifie pleinement dans la mesure où une solution inverse aurait conduit à considérer comme caduque la proposition formulée auprès du contribuable à une date où celui-ci étant encore maître de ses biens.
A rapprocher : Cass. com., 21 février 2012, n°11-12.138 ; L.641-9 du Code de commerce ; L.622-6 du Code de commerce