Exclusion de la qualité de dirigeant de fait d’un actionnaire

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QUELENNEC Kristell

Avocat associée

Cass. com., 20 avril 2017, n°15-19.750

Pour la Cour de cassation, la direction de fait ne peut se déduire de la participation des actionnaires, même majoritaires, au conseil de surveillance de la société placée en liquidation judiciaire quand bien même des décisions définissant les modalités de fonctionnement et de financement de la société auraient été adoptées à cette occasion.

Ce qu’il faut retenir : Pour la Cour de cassation, la direction de fait ne peut se déduire de la participation des actionnaires, même majoritaires, au conseil de surveillance de la société placée en liquidation judiciaire quand bien même des décisions définissant les modalités de fonctionnement et de financement de la société auraient été adoptées à cette occasion.

Pour approfondir : Aux termes de l’article L.651-2 du Code de commerce, dans sa rédaction issue de la Loi n°2016-1691 du 9 décembre 2016 : « Lorsque la liquidation judiciaire d’une personne morale fait apparaître une insuffisance d’actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d’actif, décider que le montant de cette insuffisance d’actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d’entre eux, ayant contribué à la faute de gestion. En cas de pluralité de dirigeants, le tribunal peut, par décision motivée, les déclarer solidairement responsables. Toutefois, en cas de simple négligence du dirigeant de droit ou de fait dans la gestion de la société, sa responsabilité au titre de l’insuffisance d’actif ne peut être engagée. »

Si l’action en responsabilité pour insuffisance d’actif peut ainsi être engagée à l’encontre d’un dirigeant de fait de la société placée en liquidation judiciaire, cela suppose que soit démontrée cette direction de fait, construction prétorienne sur laquelle la Cour de cassation exerce son contrôle (Cass. com. 16 mars 1999, n°95-17.420).

Pour la jurisprudence, le dirigeant de fait est la personne qui exerce directement, ou par personne interposée, une action positive et indépendante d’administration générale d’une personne morale (Cass. com., 26 juin 2001, n°98-20.115 ; Cass. com., 22 janvier 2002, n°98-21.181) ; celle qui accomplit « en toute indépendance des actes positifs de direction et de gestion » (Cass. com., 15 mars 2005, n°03-19.577).

Dans les groupes de sociétés, la direction de fait a notamment été retenue lorsque la société mère décide seule de la politique économique et financière de sa filiale, cette dernière ne disposant d’aucune autonomie à l’exception des actes de gestion de la vie courante (Cass. com. 6 juin 2000, n°96-21.134) ou lorsqu’elle s’est réservée le domaine de « l’organisation administrative et financière, la négociation des contrats et la politique commerciale » (Cass. com., 19 décembre 1995, n°92-20.116).

C’est la question soumise à la Cour de cassation dans cet arrêt rendu le 20 avril 2017 à l’occasion d’une action en responsabilité pour insuffisance d’actif initiée par un liquidateur judiciaire à l’encontre de trois sociétés actionnaires de sa liquidée. Selon le liquidateur judiciaire, ces trois actionnaires auraient exercé, par leur présence au conseil de surveillance, un « rôle décisionnel majeur » en exerçant des pouvoirs de direction par l’adoption de décisions portant sur « les modalités de fonctionnement et de financement de la société », « la planification de la trésorerie, les engagements à long terme, le lancement des travaux, les investissements et les modes de financement » de la société.

Exerçant son contrôle sur la qualification de dirigeant de fait, la Haute juridiction rejette le moyen au pourvoi formé par le liquidateur judiciaire, considérant aux termes d’un attendu limpide que « la direction de fait de la société Silpro ne peut se déduire du mode de financement mis en place au démarrage du projet, ni de la qualité d’actionnaire, même majoritaire » alors que la société « était dirigée par un directoire investi des pouvoirs les plus étendus » et que le conseil de surveillance n’a pas « excédé sa compétence ».

A rapprocher : Article L.651-2 du Code de commerce

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