Cass. soc., 7 mars 2017, n°15-16.865
Par un arrêt du 7 mars 2017, la Cour de cassation a réaffirmé sa conception plus que restrictive du co-emploi dans une espèce où, les forts liens existants et reconnus entre la société mère et sa filiale portaient pourtant à croire qu’une telle qualification puisse être justifiée.
Ce qu’il faut retenir : Par un arrêt du 7 mars 2017, la Cour de cassation a réaffirmé sa conception plus que restrictive du co-emploi dans une espèce où, les forts liens existants et reconnus entre la société mère et sa filiale portaient pourtant à croire qu’une telle qualification puisse être justifiée.
La position prise par la Cour de cassation, qui s’inscrit dans la continuité des précédentes décisions, permet de refermer la brèche qui avait été ouverte en 2012 par le Tribunal de Grande Instance de Lons le Saunier par une décision plus que contestable.
Pour approfondir : L’action fondée sur la notion de co-emploi a pour but de faire prendre en charge le paiement des salaires et autres indemnités salariales par la société mère ou toute autre société qui serait solvable et qui aurait des liens étroits avec la société qui emploie les salariés.
Cette notion s’est développée à la suite d’un jugement du Tribunal de grande instance de Lons le Saunier du 22 août 2012 qui, sur ce fondement, a condamné la société ARCHE à verser aux institutions représentatives du personnel de la société MBF une somme de 8 M€ en raison de l’existence d’un lien de dépendance et de subordination qui privait la société MBF de toute autonomie industrielle, commerciale et administrative.
En l’espèce, les faits étaient les suivants ; un casino, filiale d’un grand groupe français, a été placé en procédure de redressement judiciaire qui a par la suite fait l’objet d’une conversion en procédure de liquidation judiciaire.
Trois des salariés licenciés ont alors saisi les juridictions prud’homales aux fins de faire condamner la société mère ainsi que sa filiale au paiement de différentes sommes sur le fondement du co-emploi.
Au soutien de leurs prétentions, les salariés arguaient du fait que la société mère disposait de représentants dans les organes de direction de sa filiale et les deux sociétés étaient liées par une convention de prestation de service prévoyant l’intervention de la mère en support des services marketing, financier, technique, ressources humaines, administratif ou encore comptable.
Il était également soutenu que le dirigeant de la filiale devait soumettre son budget à l’approbation de de la société mère et rendre compte de sa gestion de telle sorte que la société filiale ne jouissait d’aucune indépendance stratégique.
Ainsi, l’ensemble des conditions du co-emploi telles que retenues par le Tribunal de Lons le Saunier étaient réunies.
La Chambre sociale de la Cour de cassation, s’inscrivant dans la continuité de ses précédentes décisions et notamment de sa décision rendue à l’occasion de l’affaire dite « Molex », (Cass. Soc., 2 juil. 2014, n°13-15.208) a jugé, par un attendu de principe, que :
« une société faisant partie d’un groupe ne peut être considérée comme un coemployeur, à l’égard du personnel employé par une autre, que s’il existe entre elles, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l’état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une confusion d’intérêts, d’activités et de direction, se manifestant par une immixtion dans la gestion économique et sociale de cette dernière ».
Cette décision s’inscrit dans la continuité des précédentes décisions rendues en la matière et vient confirmer la conception restrictive de la notion de co-emploi par la Cour de cassation qui limite en réalité l’action fondée sur les dispositions relatives au co-emploi au seul cas où il existe une réelle confusion entre les deux sociétés, pour ne pas dire des relations financières anormales ou une certaine fictivité… soit le fondement de l’action en extension.
A ce titre, la Cour de cassation a récemment eu l’opportunité de juger qu’en présence d’une réelle confusion entre deux sociétés d’un même groupe dont l’une avait perdu son autonomie au profit de l’autre, et notamment une partie importante de ses services d’exploitation, l’existence d’une situation de co-emploi était caractérisée (Cass. Soc., 6 juillet 2016,-n°15-15.481).
Toutefois, il convient de relever que la qualification de co-emploi implique seulement la prise en charge des droits salariaux à l’inverse d’une action en extension dont les conséquences sont autrement plus néfastes…
A rapprocher : Cass. soc., 6 juillet 2016, n°15-15.481 ; Cass. soc., 10 déc. 2015, n°14-19.316 ; Cass. soc., 2 juil. 2014, n°13-15.208 ; TGI Lons Le Saunier, 22 août 2012