Cass. com., 7 février 2018, n°17-10.056
La décision d’une juridiction d’un État membre, qui prononce l’ouverture d’une procédure d’insolvabilité à l’égard d’une personne morale, dont le siège statutaire est situé dans cet État, doit être reconnue immédiatement dans tous les autres États membres.
Ce qu’il faut retenir : La décision d’une juridiction d’un État membre, qui prononce l’ouverture d’une procédure d’insolvabilité à l’égard d’une personne morale, dont le siège statutaire est situé dans cet État, doit être reconnue immédiatement dans tous les autres États membres. Par conséquent, l’insolvabilité du débiteur ne peut être réexaminée à l’occasion de la seconde procédure.
Pour approfondir : En l’espèce, le 27 juin 2012, une juridiction roumaine a ouvert une procédure d’insolvabilité à l’égard d’une société, dont le siège statutaire est en Roumanie. Sur l’assignation d’un créancier français, le Tribunal de commerce de Créteil a, par un jugement du 19 mars 2014, placé cette société en liquidation judiciaire et a fixé la date de la cessation des paiements au 19 septembre 2012.
Reprochant au dirigeant de ne pas avoir déclaré l’état de cessation des paiements dans le délai légal, le ministère public a demandé que soit prononcée à l’encontre du dirigeant une sanction d’interdiction de gérer.
Considérant que les juridictions françaises en charge de la procédure principale étaient compétentes pour décider des sanctions, la procédure principale d’insolvabilité ayant été ouverte en France où le jugement du 19 mars 2014 a situé le centre des intérêts principaux de la société, et que le dirigeant avait laissé s’accumuler un passif fiscal important entre 2009 et 2011, la Cour d’appel de Paris a, par arrêt du 3 novembre 2016, prononcé contre le dirigeant une mesure d’interdiction de gérer pour une durée d’un an.
Au visa des articles 3 et 16 du règlement (CE) n°1346/2000 du Conseil du 29 mai 2000 relatif aux procédures d’insolvabilité, la Cour de cassation a, par un arrêt du 7 février 2018 publié au bulletin, cassé l’arrêt de la Cour d’appel. La Haute juridiction rappelle que la décision d’une juridiction d’un État membre prononçant l’ouverture d’une procédure d’insolvabilité à l’égard d’une personne morale, dont le siège statutaire est situé dans cet État, doit être reconnue immédiatement dans tous les autres États membres conformément aux textes précités tels qu’il sont interprétés par la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union Européenne (2 mai 2006, n°C-341/04, Eurofood, et 22 novembre 2012, n°C-116/11, Christianapol). Ainsi, si une juridiction d’un autre État membre ouvre ensuite une procédure d’insolvabilité à l’égard de la même personne, cette procédure ne peut être qu’une procédure secondaire. Par conséquent, l’insolvabilité du débiteur ne peut être réexaminée à l’occasion de la seconde procédure. Elle en déduit que le dirigeant n’avait pas à déclarer la cessation des paiements dans le pays d’ouverture d’une procédure secondaire et ne pouvait pas être sanctionné pour s’en être abstenu.
A rapprocher : Articles 3 et 16 du règlement (CE) n° 1346/2000 du Conseil du 29 mai 2000 ; CJUE, 2 mai 2006, n°C-341/04, Eurofood ; CJUE, 22 novembre 2012, n°C-116/11, Christianapol