Cass. com., 17 février 2021, n°19-20.738
Lorsqu’une créance a été déclarée et admise à titre privilégié dans le cadre d’une première procédure collective, elle est admise de plein droit au passif de la seconde procédure collective, sans nouvelle déclaration, à titre privilégié, à la condition que la sûreté soit encore valable. A défaut, la créance est admise, de plein droit, à titre chirographaire.
Une société (le débiteur) a fait l’objet d’une procédure de sauvegarde, au passif de laquelle ont été déclarées et admises des créances de la société Cooperl (le créancier), avec la particularité que ces créances ont été admises partiellement à titre privilégié en vertu de deux warrants agricoles (les sûretés), établis en 2005 et 2006 et valables pendant une durée de cinq années.
Un plan de sauvegarde a été arrêté en décembre 2008 avant d’être résolu en mars 2015 par un jugement ayant également prononcé la liquidation judiciaire du débiteur.
A cette occasion, le créancier a indiqué au liquidateur qu’il subsistait un solde sur la déclaration de créance initiale et a demandé son admission à titre privilégié dans la nouvelle procédure, ce qui a été refusé par le liquidateur dans la mesure où les sûretés étaient arrivées à échéance et n’avaient pas été renouvelées, lequel a donc admis les créances, à titre chirographaire seulement.
Le créancier demande à bénéficier des dispositions de l’article L.626-27 III du Code de commerce, lequel prévoit qu’après résolution d’un plan et ouverture d’une nouvelle procédure, les créanciers soumis à ce plan et admis au passif de la première procédure sont dispensés de déclarer à nouveau leurs créances et sûretés, la conséquence étant que lesdites créances et sûretés inscrites au plan de sauvegarde sont admises de plein droit à la seconde procédure.
La cour d’appel a rejeté cette demande et a maintenu la créance à titre chirographaire aux motifs que le créancier n’aurait pas répondu, dans le délai de trente jours qui lui était imparti, à la discussion sur sa créance instaurée par le mandataire judiciaire.
Sur ce point, la Cour de cassation censure le raisonnement de la cour d’appel en rappelant que l’article L.626-27 du Code de commerce prévoit l’admission des créances à la seconde procédure, de plein droit, sans nouvelle vérification, sous la seule déduction des sommes déjà perçues, de sorte que l’existence des créances n’avait pas à être discutée. Le fait que le créancier adresse un courrier au liquidateur valait mise à jour du montant de la créance et non déclaration d’une nouvelle créance.
Néanmoins, la Cour de cassation confirme la décision d’admission des créances, à titre chirographaire et non privilégié, dans la mesure où les warrants, dont la durée de validité est de cinq années, sont arrivés à échéance en 2010 et 2011 et n’ont pas été renouvelés par le créancier. La cour rappelle à ce titre que l’autorité de la chose jugée attachée à l’admission à titre privilégié n’a pas d’effet conservatoire pour l’avenir des sûretés qui ne sont pas renouvelées, même en cas d’adoption d’un plan de résolution de celui-ci et d’ouverture consécutive d’une nouvelle procédure collective. Le créancier aurait donc dû veiller, pour le maintien de ses créances à titre privilégié, à bien renouveler ses sûretés.
A rapprocher : Articles L.622-27 et L.626-27 du Code de commerce ; Article L.342-7 alinéa 3 du Code rural et de la pêche maritime ; CA Rennes, 3ème ch. com., 4 juin 2019, Cooperl Arc Atlantique