Com, 9 septembre 2020, n°18-26.824
Il résulte de la combinaison des articles L. 661-1, 2°, et R. 661-6, 1° du code de commerce, et de l’article 424 du code de procédure civile qu’en vertu du principe d’indivisibilité du litige, le débiteur qui fait appel du jugement prononçant sa liquidation judiciaire doit intimer les mandataires de justice, mais que le ministère public, considéré comme une simple partie jointe, doit simplement se voir communiquer l’affaire par la cour d’appel.
Par jugement du 9 mai 2017, une société a été admise au bénéfice d’une procédure de redressement judiciaire. Sur demande du mandataire judiciaire, cette procédure de redressement a été convertie en liquidation judiciaire.
Le débiteur a interjeté appel de cette décision de conversion en liquidation judiciaire.
L’appel du débiteur a été jugé irrecevable par les juges du fond, la Cour d’appel considérant que le ministère public aurait dû être intimé à la procédure au même titre que le mandataire de justice.
Pour justifier sa position, la Cour d’appel s’est fondée sur les dispositions de l’article L. 661-1 2° du Code de commerce aux termes desquelles :
« I.- Sont susceptibles d’appel ou de pourvoi en cassation :
[…]
2° Les décisions statuant sur l’ouverture de la liquidation judiciaire de la part du débiteur, du créancier poursuivant, du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel et du ministère public ; »
Partant, la Cour d’appel en a déduit que le ministère public ayant qualité pour interjeter appel du jugement prononçant la liquidation judiciaire, il devait être de ce fait mis sur le même plan que les autres parties à la procédure.
A cet égard, les mandataires judiciaires, lorsqu’ils ne sont pas appelants, doivent être intimés sur l’appel d’un jugement de conversion d’un redressement judiciaire en liquidation judiciaire (C. com. R. 661-6, 1). La Cour d’appel a considéré que cette solution s’imposait identiquement pour le ministère public dont la faculté d’interjeter appel d’un tel jugement justifiait un traitement similaire.
Au visa des articles L. 661-1 2° et R.661-6 1 du Code de commerce et de l’article 424 du Code de procédure civile, la Cour de Cassation censure le raisonnement de la Cour d’appel aux termes d’un attendu clair :
« Si le débiteur, qui fait appel du jugement prononçant sa liquidation judiciaire, doit intimer les mandataires de justice, à raison du lien d’indivisibilité existant, en cette matière, entre le débiteur et ces mandataires, un tel lien n’existe pas à l’égard du ministère public, partie jointe, auquel il appartient seulement à la Cour d’appel de communiquer l’affaire. Dès lors, viole les textes précités, la Cour d’appel, qui, pour déclarer irrecevable l’appel du débiteur, retient qu’en raison de l’indivisibilité applicable en matière de liquidation judiciaire, il appartenait à ce dernier de mettre en cause le ministère public en dénonçant l’assignation au procureur général »
Pour la Haute juridiction, lorsque le ministère public est partie jointe à l’instance, c’est-à-dire « lorsqu’il intervient pour faire connaître son avis sur l’application de la loi dans une affaire dont il a communication » (CPC, art. 424), il n’a nullement la qualité de partie principale.
La faculté qui lui est offerte par l’article L. 661-1 2° précité ne lui confère pas pour autant cette qualité, aucun lien d’indivisibilité n’existant avec le débiteur en cette matière.
A rapprocher : Civ 2ème, 28 septembre 2017, 16-21.881 ; Com, 8 juillet 2003, n°01-13.693