Cass. soc., 6 mars 2019, n°17-28.478
Dans le cadre d’un transfert d’une entité autonome, le nouvel employeur peut se prévaloir, pendant une durée de quatre ans, du procès-verbal de carence aux élections professionnelles dressé au sein de l’entreprise cédante, si l’entité transférée a conservé post transfert son autonomie.
Dans le cadre des élections professionnelles, si aucune institution représentative du personnel n’a pu être mise en place ou renouvelée, l’employeur dresse un procès-verbal de carence. Cette formalité est indispensable afin d’éviter à l’employeur de se voir sanctionné pour défaut de consultation des instances représentatives du personnel quand une consultation est obligatoire.
La Cour de cassation a dû se prononcer sur l’opposabilité, au sein de l’entreprise d’accueil, du procès-verbal de carence établi par l’entreprise cédée, dans le cadre d’un transfert de salariés en application de l’article L.1224.1 du Code du travail.
Dans le cas d’espèce, une société qui avait dressé un procès-verbal de carence à la suite des élections professionnelles a été cédée. Les salariés y travaillant ont ainsi fait l‘objet d’un transfert automatique chez le repreneur. Un des salariés transférés a par la suite été licencié dans le cadre d’une procédure de licenciement pour inaptitude. Cette dernière impose à l’employeur de recueillir l’avis des délégués du personnel (CSE désormais) concernant les propositions de reclassement.
Pour justifier de l’absence de consultation des instances représentatives du personnel, l’employeur se prévalait du procès-verbal dressé lors des dernières élections professionnelles au sein de l’entité cédée.
Ce document avait été établi avant le transfert des salariés (donc dans une autre structure juridique) et datait de près de deux ans.
Pour les juges du fond comme pour la Cour de cassation, le procès-verbal continue de produire ses effets et le nouvel employeur peut s’en prévaloir. En effet, l’entité cédée avait conservé son autonomie dans la nouvelle structure. Or, les mandats des institutions représentatives du personnel sont transférés lorsque l’entité économique à laquelle est rattaché le représentant du personnel conserve son autonomie et que l’activité est poursuivie. Ainsi, dans le cas d’espèce, si des délégués avaient été élus au sein de l’entreprise cédée, les mandats se seraient poursuivis dans la structure d’accueil après le transfert. Pour la Haute juridiction, le procès-verbal de carence continue également à produire ses effets post transfert dans la nouvelle entité qui emploie désormais les salariés.
Par ailleurs, ce procès-verbal est valable pendant une durée de quatre ans (durée légale des mandats) en l’absence de demande d’organisation d’élections professionnelles émanant d’une organisation syndicale ou d’un salarié. Lors de la procédure de licenciement de ce salarié pour inaptitude, aucune demande d’organisation d’élections n’ayant été faite, la procédure de licenciement était tout à fait licite. La solution aurait été différente si un salarié ou un syndicat avaient sollicité (six mois au minimum après l’établissement du procès-verbal de carence) l’organisation d’élections professionnelles. Dans un tel cas, l’employeur aurait eu l’obligation de les mettre en place dans le délai d’un mois.
A rapprocher : Cass. soc., 11 mai 2016, n°14-12.169